La vigne et le vin sont totalement dépendants du millésime à travers les caractères des saisons et les impondérables météorologiques. Chaque travail et chaque tache en viticulture et en vinification s’inscrivent dans le respect d’un calendrier précis. Voilà pourquoi, au cours d’une année, il y a des moments qui demandent un investissement important en temps et en personnel et d’autres beaucoup plus calmes où les exigences de disponibilités et de travail sont en veille.
En viticulture, le bon sens sonne comme une évidence : du printemps aux vendanges, l’activité vigneronne tourne à plein régime avec le suivi de la croissance de la plante, de la maturité du raisin et de sa récolte dans les meilleurs conditions possibles. Lorsque la date de cueillette est arrêtée, il est quasiment impossible pour le vigneron de se dire « ça peut attendre quelques jours ou la semaine prochaine ». Pour ce qui concerne la qualité optimale du raisin – et pour peu que la météo soit complexe : chaleur, humidité, etc. – tout se joue parfois à quelques heures près. Voilà pourquoi, tout domaine doit pouvoir compter au pied levé sur des équipes à la fois de permanents et de saisonniers prêtes à intervenir. Ce qui suppose que ces personnes peuvent travailler bien au-delà des 35 hebdomadaires légales, parfois c’est le double !
Chaque année, les syndicats doivent batailler avec l’administration pour obtenir des dérogations sur la durée horaire de travail hebdomadaire, dérogations remises systématiquement sur la table des négociations et rendues de plus en plus difficiles car soumises à des exigences de plus en plus « exigeantes » !
En Champagne, par exemple, la filière vient d’obtenir des quotas d’heure de 60 à 72 heures hebdomadaires en fonction des postes de travail : réception de la vendange, pressurage, vinification, restauration des équipes, etc.
Face à cette complexification administrative et aussi à des exigences d’hébergement dignes de l’hôtellerie – avec des investissements impensables pour la plupart des domaines – l’organisation des vendanges a été bouleversée depuis une vingtaine d’années. Au point que presque tous font désormais appel à des sociétés de prestations de services, avec des côtés à la fois positifs et négatifs.
Mais pendant les vendanges, une chose est bien visible lorsqu’on se déplace dans les vignobles ou qu’on interroge les vignerons : la grande majorité des coupeurs et des porteurs se recrute désormais au sein de pays de l’Est – Pologne, Roumanie, Bulgarie… – en Espagne ou au Maroc, en Tunisie, en Algérie. Faute de candidats en France le « travailler plus pour gagner plus » fait de moins en moins d’émules, sans compter la pénibilité du travail et son côté de moins en moins festif. Car les vendanges sont devenues un job comme un autre alors qu’elles étaient ancrées dans une authentique culture du vin qui mêlait la jeunesse et le travail, la bonne humeur et le partage.